Comment fabriquer du whisky
Comment fabriquer un whisky
La fabrication d'un whisky nécessite d'utiliser 3 ingrédients: de l'eau, du malt et des levures que l'on va utiliser pour produire un moût d'alcool (qui n'est autre qu'une base de bière). Cette alcool sera ensuite distillé puis vieilli au moins 3 ans en fût de bois de moins de 700 litres.
Un résumé approximatif mais facile à mémoriser est que le whisky est une bière que l'on distille et que l'on fait vieillir. Plongeons nous un peu plus dans cet univers.
Diagramme de fabrication
Quels sont les différentes céréales dans le whisky ?
Le whisky peut être fait à partir de différentes céréales comme matières premières ; voici les principales : le blé, le blé noir (sarrasin) l'orge, le maïs et le seigle. Elles ne sont pas classées ici par ordre d'importance. L'orge est de loin celle qui est le plus utilisé dans la fabrication des Whiskies hors Bourbon.
Il y aussi le maïs qui est essentiellement utilisé au États-Unis pour avoir l'appellation Bourbon qui doit contenir plus de 51% de maïs. L'orge reste la plus utilisée à travers le monde, comme pour la bière car elle à plusieurs avantages: elle pousse facilement, elle est plus facile à brasser et donne plus de rendement.
Notre sélection
Nous travaillons en partie et de plus en plus avec de l'orge locale cultivée par des exploitations à taille humaine sur les départements de la Drôme et de l'Ardèche, pour tous nos malts non tourbés (on parle de ce qu'est la tourbe dans la section suivante). Les deux malteries avec qui nous travaillons sur nos malts non tourbés sont aussi sur ces départements et sont aussi à taille humaine. Concernant nos malts tourbés, nous travaillons avec une de ces deux malteries depuis peu et continuons de travailler avec une malterie Belge qui utilise de l'orge français provenant d'exploitations beaucoup plus importantes. En 7 ans, nous sommes passés de 100% de malt provenant de cette malterie Belge à 70% de malts locaux. Nous avons même lancé un fût avec de la Ponote une variété d'orge originaire du Velay semée et récoltée par un ami agriculteur. Nous n'avons pas pu étendre cela car le traitement de l'orge entre le champs et la malterie est plus complexe qu'il n'y parait (tri, séchage, transport). Les malteries locales proposent toutes du maltage à façon pour ce type d'expérience, mais travaillent majoritairement sous contrats avec des agriculteurs pour les malts de leurs catalogues.
Soleil levant sur un champ d'orge à Solignac sur Loire, face au Mézenc :
Quelles sont les étapes du maltage ?
Une fois arrivé à la malterie, le grain va être mis en germination, c'est-à-dire qu'on humidifie le grain dans de l'eau à environ 15°C pendant 48 heures pour faire sortir la chaire : c'est le trempage. Ensuite le grain commence sa germination pendant 5 à 7 jours sur une aire de maltage où il alterne repose et mélange. Il faut bien aérer le grain pour éviter les moisissures, que ce soit manuellement ou de manière automatisée. Cette étape est importante pour une germination homogène et optimale.
Cela permettra aux enzymes, notamment les amylases, de se développer dans le grain que nous utiliserons pour transformer l'amidon du grain en sucre lors du brassage. L'amylase est une enzyme naturelle, la même que nous avons dans le tube digestif, qui permet de créer et accélérer la transformation chimique de l'amidon en sucres. En effet une fois ingéré l'amidon est transformé en sucres rapides et sucres lents ce qui va donner à notre corps de l'énergie pendant la germination.
Chez Highland Park le maltage est traditionnel: une pelle et de l'huile de coude !
Alors que dans le Groupe Soufflet, comme presque partout désormais c'est automatisé.
Une fois cette étape effectuée, nous passerons au touraillage du grain, c'est-à-dire le séchage du grain. Schématiquement, le grain sera éparpillé sur une grille sous laquelle il y a une source de chaleur pour le sécher. Le but étant de stopper la germination et de pouvoir stocker le malt pour la suite. C'est à ce moment-là qu'on pourra alimenter ou non le séchage avec de la tourbe pour obtenir un whisky tourbé.
La tourbe ressemble à de la terre mais c'est en réalité un amas de matières organiques fossiles qui se sont accumulées au cours des millénaires passées. Ce sont des végétaux morts, qui ses sont dégradés dans un milieu très humide. La tourbe forme la majeur partie des sols des tourbières. Une fois séchée, elle donne un très bon combustible noir, très utilisé autrefois notamment en Écosse et en Irlande pour tout type d'application. La combustion de cette tourbe donnera des phénols aromatiques (fumé et terreux) au grain que l'on trouvera en goût dans le whisky.
Lors du maltage, on peut tourailler le grain jusqu'à une torréfaction qui peut donner des arômes de café, d'aliments grillés voire calcinés, tous les arômes empyreumatiques de manière générale. Le degré de touraillage se mesure indirectement en EBC; en réalité les EBC (European Brewery Convention) servent à mesurer le niveau foncé de couleur que la bière aura après brassage et bien entendu, plus un grain est grillé, plus il donne de couleur. La majorité des malts utilisés sont à environ 5 EBC.
Seigle malté entre 500-800 EBC
Orge malté entre 5-6 EBC
Le malt dans le Velay :
Sur les plateaux qui entourent le Velay, on produisait beaucoup d'orge autrefois, car les sols et le climat du Velay se prêtent à merveille à la culture cette céréale, qui est d'ailleurs très complémentaires avec la culture de la lentille Verte du Puy-en-Velay qui nécessite une rotation forte des sols. Une fois récoltée, était apportée aux malteries, elles-mêmes proches de la gare du Puy-en-Velay pour pouvoir approvisionner de grosses brasseries françaises. Malheureusement, ces malteries ont fermé comme celle de la rue de la Gazelle qui a été démolie au début du mois de février 1980 pour laisser place à une central téléphonique de télécommunication, en prévision de l'extension et la modernisation des lignes. Puis au début du 21ème siècle, des brasseries artisanales se sont installées un peu partout permettant la création de nouvelles malteries localement.
Le brassage du malt
Le but du brassage est de réaliser la transformation chimique de l'amidon présent dans le grain (environ 85% du grain est de l'amidon) en sucres qui seront plus tard assimilables par des levures pour fermenter (cf. paragraphe suivant).
Tout d'abord, nous devons concasser le malt en une bonne mouture, c'est-à-dire, ni trop grosse, ni trop fine (farine). La taille de la mouture va avoir un effet direct sur nos rendements et sur le bon déroulement du brassage.
Ensuite cette mouture est mise dans une eau chauffée à 65°C au préalable: c'est l'empattage. Comptez environ 1000L d'eau pour 250kg de malt.
Puis vient le temps du brassage: une fois intégrée à l'eau, la mouture est brassée par un bras mécanique, qui est de temps en temps appuyé par un brassage manuel du brasseur à l'aide d'un fourquet.
L'ajout du malt va faire chuter la température en dessous de 60°C ; il faut donc remonter la température et balayer la plage 60-70°C pendant le brassage. C'est dans cette plage de température que les alpha et beta amylase, les enzymes présentes dans le grain suite au maltage, vont entrer en action et transformer l'amidon en sucres. Le sucre principal qui sera créé est le maltose, mais il y a d'autres sucres créés.
Une fois le brassage terminé, nous allons filtrer notre brassin pour récupérer le liquide sucré : le moût. Afin de récupérer un maximum de sucres, nous allons rincer les restes de malt, qui s'appellent les drêches, avec 400L d'eau chaude supplémentaire à 70°C.
Nous obtiendrons ainsi un résultat de 1200L de moût.
La fermentation
Nous laissons refroidir le brassin jusqu'à 30°C et ajoutons les levures qui vont permettre la fermentation du moût pendant une semaine. Les levures, qui sont des champignons, vont s'enrichir de ce sucre pour produire du Dioxyde de Carbone et de l'alcool. Nous obtiendrons une bière à environ 7% d'alcool (et donc 93% aqueux). Le fermentation pour un whisky ne nécessite pas le même contrôle de température que pour la bière.
En résumé, formule chimique de la transformation de l'amidon en alcool:
C6H10O5 + H2O --> C6H12O6 --> 2C2H5OH + CO2
Amidon Sucre Alcool
Qu'est-ce que la distillation ?
La distillation est un procédé de séparation des d'éléments aqueux et de l'alcool. Cette distillation va s’effectuer par évaporation et condensation.
En effet nous allons faire chauffer notre moût fermenté (1), les molécules d'alcool vont s'évaporer (2) pour aller dans un serpentin qui baigne dans l'eau froide (3). Il va y avoir un échange thermique et l'alcool sous forme gazeuse va condenser pour redevenir un liquide.
L'alcool s'évapore avant l'eau car il est plus léger ; un litre d'alcool pur pèse environ 800 grammes.
Différentes façons de distiller un spiritueux
Suivant la forme de l'alambic, il existe 2 types de distillation; il y a la distillation à repasse et la distillation à reflux ou fractionnée.
L'alcool étant dissous dans l'eau, l'alcool et l'eau sont donc bien mélangés. Il n'est donc pas simple de les séparer et suivant la forme et les capacités techniques de l'alambic, le degré de séparation de l'eau et de l'alcool varie. L'objectif étant d'obtenir un distillat supérieur à 60% pour être bon au goût, propre et prêt pour le vieillissement.
La distillation à repasse consiste à effectuer deux voir trois distillations différentes pour atteindre notre objectif, ce qui donne un alcool moins pur et moins fruité qu'une distillation à reflux mais avec plus d'arômes des matières premières et un distillat plus gras. La distillation à reflux quant à elle utilise souvent des colonnes de rectification, qui elle va se faire en une seule passe ce qui donnera un alcool plus pur.
(chez nous)
Nous avons choisi des alambics à repasse type charentais pour commencer en 2017. Vue la jeunesse de nos produits il est plus intéressant de mettre en avant les arômes de nos matières premières. Ce sont des alambics type charentais de 300L chacun, en cuivre, martelés à la main. En 2021, nous avons acquis un alambic charentais de 2000L qui a réalisé du Cognac pendant une cinquentaine d'années.
Première passe
La première passe va nous permettre de séparer par évaporation les éléments les plus volatile (alcool) des moins volatils (eau) sans faire de sélection d'alcool. Nous allons obtenir un résultat d'environ 30% d'alcool.
Deuxième passe
La deuxième passe en revanche, va elle aussi nous permettre de séparer l'alcool de l'eau pour nous donner un alcool plus pur., entre 65% et 70%
Nous écartons les premières gouttes d'alcool car elles sont dangereuse pour la santé. On appel ça les têtes et elles contiennent du méthanol. En second temps nous récupérons le cœur de chauffe, un alcool transparent qui sera bon pour la consommation. Ce sont les meilleurs alcools, qui vont pouvoir être mis en vieillissement. On peut appeler ça une eau de vie de malt. Pour finir il reste les queues, les derniers alcools qui seront de nouveau distillées. Il y a comme un cycle infini où l'on redistille une quantité de Queues que l'on retrouve après la distillation.
Parlons alambics
Historiquement alambic vient de l'arabe "al inbïq" provenant peut-être du Nord de l'Irak 3 500 av. J.C, ou peut-être même de Chine auparavant. Il permettait de faire des eaux florales, des huiles essentielles ou encore des médicaments. C'est bien plus tard 200-300 après J.C qu'on a commencé à faire la production de fruits fermentés. Le refroidissement en spiral n'est apparu qu'au XI ème siècle. Puis au XIII ème siècle on retrouve les premières traces d'orge distillé en Ecosse et la légalisation du whisky ne remonte qu'au début du XIX ème siècle (1823).
Les alambics ont tout d'abord été fabriqués en cuivre car il y a une très bonne transmission de chaleur et c'est un métal très malléable. Puis il y a eu l'apparition de l'inox qui lui ne s'oxyde pas l'eau et permet de réaliser de plus gros modèle.
Pour en savoir plus sur l'histoire du whisky, vous pouvez consulter notre page sur l'histoire du whisky.
Le vieillissement du whisky
Le vieillissement du whisky est normé et légalisé avec la règle suivante : 3 ans minimum en fût de bois de moins de 700 litres.
Dans notre chais à 900 mètres d'altitude dans le Velay, nos whisky sont vieillis dans des fûts de chêne neufs ou du Sherry. En novembre 2020 nous avons sorti notre premier whisky car pour avoir l’appellation whisky il faut qu'il ait passé minimum 3 ans en fût de bois sans avoir été à nouveau remplis avec un distillat plus jeune.
Nous travaillons pour nos fûts neufs avec un très bon artisan, la Tonnellerie Desfrieches située dans le Calvados, chez qui nous trouvons nos fûts uniques et qui nous a partagé sa passion pendant 2 jours lors de notre première rencontre. Il recycle des fûts ayant contenu du vin rouge de Bordeaux en les ponçant et en les rebrûlant (le bousinage).
Actuellement, nous avons 4 Single Malt whiskies différents : un non tourbé vieilli en fût neuf, le whisky La Besse ; un autre très légèrement tourbé vieilli dans les fûts neufs, le whisky Mandrant ; un autre whisky, le Montagnac, tourbé et vieilli en fût de Sherry et enfin, le whisky La Gare, vieilli lui aussi en fût neuf un peu plus tourbé. La tourbe se mesure en ppm, soit sur la matière première, soit sur le produit fini. De notre côté, nous utilisons le degré de tourbe sur le malt et utilisons des malts à 20ppm et à 45 ppm. Les whiskies les plus tourbés au monde sont aux alentours de 200ppm.
En 2029 notre tout premier 10 ans d'âge sera une étape symbolique supplémentaire de passée.
Il ne faut pas oublier qu'il y a une perte chaque année, 2 à 3% dans notre chai ; ces pertes se nomment "La part des anges". Nous vous conseillons d'ailleurs de regarder l'excellent film de Ken Lock à ce sujet.
Une grande partie des fûts contenant du whisky dans le monde sont des fûts de Bourbon. En effet pour avoir l'appellation Bourbon aux États-Unis il faut avoir un fût neuf donc après utilisation, de nombreux fûts d'occasion arrivent en Europe et en premier lieu en Ecosse pour le vieillissement du whisky.